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Réforme du droit de la responsabilité extracontractuelle : entrée en vigueur du nouveau Livre 6

Publié le 18/11/2024.

Réforme du Code Civil : Nouvelles règles sur la responsabilité extracontractuelle

Le droit belge évolue avec l'entrée en vigueur du Livre 6 du Code civil le 1er janvier 2025. Publié au Moniteur Belge le 1er juillet 2024, ce texte clarifie les règles de responsabilité extracontractuelle et introduit des réformes pour résoudre des ambiguïtés juridiques persistantes. Examinons ce que cela implique pour les sous-traitants, administrateurs, employés et l'impact sur les polices d'assurance.

Ce qu'il en est jusqu'à présent

Traditionnellement, en l'absence de cadres juridiques explicites concernant la responsabilité extracontractuelle, le système belge s'est construit autour de deux principes fondamentaux :

  1. Le refus du cumul entre responsabilités contractuelle et extracontractuelle : Ce principe, établi notamment par un arrêt de la Cour de cassation en 1973, prohibait toute action en responsabilité extracontractuelle pour les préjudices découlant d'une rupture contractuelle. L'objectif principal était d'empêcher les parties de contourner, par le biais de recours extracontractuels, les limites de responsabilité définies dans leurs contrats. En conséquence, les actions en responsabilité contractuelle constituaient le recours principal en cas de manquements, reléguant les actions extracontractuelles au second plan. Cependant, des exceptions à cette règle existaient, notamment dans les cas où une infraction pénale découlait de la violation de l'obligation contractuelle, illustrant ainsi la complexité de l'application de ce principe.
  2. La protection quasi-absolue des agents d'exécution : Cette doctrine garantissait aux agents impliqués dans l'exécution des obligations contractuelles (administrateurs, sous-traitants, prestataires indépendants, employés, etc.) une forme d'immunité contre toute action, qu'elles soient contractuelles ou extracontractuelles, de la part du créancier de leur mandant. Toutefois, cette protection connaissait des limites dans des situations exceptionnelles, notamment lorsque les actes en question relevaient d'une activité criminelle.

Ces principes, bien qu'historiquement ancrés dans la doctrine belge, ont été sujets à débat en raison de leurs implications sur l'équilibre des responsabilités dans les relations contractuelles.

Ce qu'il en sera avec le nouveau Livre 6

Levée de l’interdiction du concours

Le Livre 6 instaure la possibilité pour une partie lésée de choisir entre une indemnisation basée sur la responsabilité contractuelle ou extracontractuelle, sous réserve que les conditions applicables soient remplies. Le défendeur pourra toutefois invoquer les clauses limitatives ou défensives prévues dans le contrat principal, sauf en cas d’atteinte à l’intégrité physique ou psychique, ou de faute intentionnelle.

Les parties conservent la faculté de restreindre ce choix en stipulant dans leur contrat l’interdiction de ce cumul, sauf dans les cas mentionnés ci-dessus.

Fin de la quasi-immunité des agents d’exécution

Le nouveau Livre 6 abolit le principe de quasi-immunité dès lors qu’il permettra à une partie contractante d'engager la responsabilité directe de l’agent d’exécution de son cocontractant en cas d'erreur dans l'exécution du contrat. 

En ce qui concerne les moyens de défense ouverts à l’agent d’exécution confronté à une action en responsabilité extracontractuelle, le Livre 6 prévoit une double protection, selon laquelle l'agent d’exécution peut généralement invoquer des moyens de défense contractuels provenant à la fois du contrat entre l'agent d’exécution et son donneur d’ordre, et du contrat entre le donneur d’ordre et son cocontractant (dans la mesure où l'agent d'exécution a connaissance du contenu de ce contrat), ainsi que des moyens de défense provenant de toutes les lois spéciales applicables à ces contrats. En outre, il est possible d'exclure contractuellement la responsabilité extracontractuelle de l'agent d'exécution. 

Si ce dernier commet une faute, soit avec l'intention de causer un dommage, soit qui cause un dommage résultant d'une atteinte à l'intégrité physique ou psychique, il ne pourra pas invoquer les moyens de défense contractuels provenant à la fois du contrat entre l'agent d'exécution et son donneur d’ordre, et du contrat entre le donneur d’ordre et son cocontractant.  

Pourquoi ce Changement ?

L’objectif de cette réforme est d'éliminer certaines situations désavantageuses. Par exemple, le maître d’ouvrage, qui n’avait jusque-là de recours qu’envers l’entrepreneur principal, se trouvait dans l'incapacité de poursuivre un sous-traitant si l’entrepreneur principal faisait faillite.

Cette nouvelle législation apporte une plus grande souplesse et permet de répartir les responsabilités financières entre les différents acteurs impliqués, réduisant ainsi le risque pour les parties lésées.

Possibilités de Dérogation à la Nouvelle Réglementation

Le législateur permet toutefois de maintenir une quasi-immunité contractuelle. Des clauses limitant la responsabilité peuvent donc être intégrées dans les conditions générales ou dans les contrats individuels (contrats de travail, accords de coopération, contrats de sous-traitance, etc.).

Cela permet de protéger certaines parties des réclamations extracontractuelles, sous réserve de respecter les limites légales concernant les atteintes graves ou intentionnelles à l’intégrité physique ou psychique.

Impact sur les polices d’assurance

Polices Responsabilité civile :

  • La possibilité d’intenter des actions contre les agents d'exécution oblige désormais à définir les assurés de manière large pour inclure tous les individus travaillant pour une partie contractante, comme les employés, indépendants, stagiaires, intérimaires, et bénévoles.
  • La couverture dans le temps devra faire l'objet d'une clause dans les polices RC.

Police d’assurance responsabilité des administrateurs :

  • L'utilité de cette couverture est plus que jamais prouvée et il serait imprudent de continuer à travailler sans couverture adaptée.
  • Les polices d’assurance couvrant la responsabilité des administrateurs couvrent déjà les actions intentées par des tiers pour faute de gestion.
  • L’introduction d’une responsabilité extracontractuelle ne modifie pas les garanties de cette couverture, mais avec l’extension de la responsabilité externe des administrateurs, une augmentation des réclamations et des frais de défense est anticipée.

Quand le Livre 6 Entrera-t-il en Vigueur ?

Les dispositions du Livre 6 s’appliquent aux faits susceptibles d’entraîner une responsabilité qui se sont produits après son entrée en vigueur. L’ancien régime reste d’application pour les événements dommageables qui se sont produits avant cette date, même si leurs effets s’étendent après cette entrée en vigueur. 

Chez Avesta Insurance, nous recommandons à nos clients de :

  1. Tenir compte d’une éventuelle exonération de responsabilité extracontractuelle de leurs travailleurs lors de la rédaction et de la négociation des contrats commerciaux et des contrats de travail.
  2. Revoir leurs contrats existants pour intégrer des clauses limitantes ou organisant la responsabilité selon les nouvelles règles.
  3. Vérifier les polices d’assurance pour garantir une couverture adéquate de tous les assurés dans le temps.

Cette réforme représente un changement important pour toutes les entreprises, leurs dirigeants et leurs préposés. Nous sommes à votre disposition pour en discuter et vous conseiller au mieux sur les démarches à entreprendre en termes d'assurances.

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